Seconde partie de notre compte-rendu à huit mains du festival GéNéRiQ à Dijon. Une édition faite de cotillons, de patins à glace, de tendresse, de nichons, et bien plus encore.
SAMEDI.
Si vous suivez bien, vous remarquerez qu’on passe directement au samedi. Rassurez-vous, on a juste fait un break d’un jour avant de rattaquer avec le concert de Cody Chesnutt à la Ferronnerie, qui en plus affichait complet. Normal après tout, ça fait dix piges que l’artiste rhythm and blues d’Atlanta n’avait pas sorti d’album. Postés à côté du technicien vers le fond, autant le dire tout de suite : on n’a pas du tout vu Cody pendant qu’il jouait. En se hissant sur une chaise, on a juste aperçu son casque vert qu’il ne quitte apparemment plus. C’est un peu le seul problème de la Ferronnerie : si t’es pas dans les trois premiers rangs, tu ne vois strictement rien.
Configuration minimaliste pour ce gig, il joue seul avec sa guitare, prenant parfois place derrière un piano. Il a d’ailleurs quelques problèmes de micro, ce qui ne l’empêche pas de continuer a capella. Et ça suffit amplement parce que sa voix ronde de crooner n’a besoin d’aucun apparat. Les morceaux s’enchaînent doucement, ses balades sont comme des caresses pour nos petites oreilles de blancs-becs, les textes gonflés de bons sentiments font sourire. Il est fort ce Cody. S’il avait voulu, à la fin du concert, il aurait pu repartir avec n’importe quelle nana présente dans l’assemblée. Au lieu de ça, il prend le temps de serrer des mains, anime l’atelier photo frigo – dédicaces en remerciant tout le monde. Alors, même si c’était l’unique concert R&B de la programmation GéNéRiQ sur Dijon cette année, au plus grand regret de certains, Cody Chesnutt s’est révélé être un parfait ambassadeur.
Samedi. En soirée. Du gros gâteau. The George Kaplan Conspiracy, BRNS, Von Pariahs, Rich Aucoin sur le line-up, encore au Consortium. La soirée de hypeux parfaite, autant vous dire qu’on était chauds comme des marrons. Les locaux de The GKP Conspiracy, récemment pris sous le coude de la Vapeur pour être accompagné, plantent les premières banderilles dès 20h30. Un peu flippés à l’idée de jouer pour les murs (qui vient à un concert à peine le fromage terminé, à part pour voir Didier Super ?), les trois boys font finalement face à une salle bien remplie. Ok, il y a tous leurs potes, mais quand même. The George Kaplan Conspiracy, c’est de la pop électronique, et la voix si particulière de Gabriel, le chanteur. Il y a encore des trucs à régler, ils sont jeunes, ils n’ont pas encore pris beaucoup de drogue, mais musicalement c’est vraiment intéressant. On soutient. Par contre niveau ambiance dans le public, c’est pas forcément ça. Dessert pas totalement digéré ?
Enchaînement grand écart avec les chouans de Von Pariahs, qui arrivent deuxième sur le podium de la prog’ GéNéRiQ du samedi. Moitié Nantais, un tiers Vendéens et un quart from Jersey, les Von Pariahs débordent de l’étiquette et du plateau du Consortium. On vous le dit tout de suite, ce groupe a fait débat dans le public et la rédaction de Sparse. Grand groupe de rock pour les uns, band échoué d’un pub de Millwall pour les autres. Déboulé en 2009, le combo de 6 s’est goinfré de dates live et s’est forgé des réflexes sonores impeccables avec un EP où on retrouve Skywalking, haute pépite de ce concert. Son mancunien, deux-trois références pour journaleux un peu flemmard (The Fall, Joy Division…) et une putain de cohésion solide en scène : chacun sa partie mais tous à refaire l’histoire de la new-wave jusqu’au goût du jour. Le jeune frontman angliche, visiblement descendu d’un film d’Alan Clarke sur Paul Gascoigne, culbute le vice jusqu’à afficher la part popu-bière du rock. Vautrés dans des tubes envoyés façon pousse-au-pogo, la classe marche d’emblée et sépare les rangs, comme on vous le disait : il y a ceux qui ont les genoux pris direct dans le shoegaze à la crème anglaise et les autres, de l’autre côté du terrain, beuglant : « Mais enfin, c’est du pub rock ! »
Allez, BRNS. On s’était mouillés jusqu’au cou pour vous les annoncer révélations du festival, on s’est pas trop trompés, alors ça fait plaisir. D’ailleurs, quand on fait juste remarquer aux gars que parfois, lorsqu’ils ont l’impression de faire de la pop ils repartent direct dans du math-rock alambiqués, ils acquiescent : « Mec, si ça sonne trop pop, au final on fout en l’air » (ils sont Belges, pour info). Bon d’accord les gars, on fait comme ça…
1h du mat’, l’heure pour Rich Aucoin de débouler sur scène. Généralement, à ce moment tardif de la soirée au Consortium, les gens sont soit partis se coucher, soit en train de fumer des clopes dehors, soit en train de commander une dernière bière au bar. Étrangement ce samedi soir, les choses vont tourner d’une toute autre manière. Rich Aucoin, c’est une sorte de Girl Talk version canadienne : show déglingo à base de cotillons, de public en mode insane, de bière renversée et de vidéos débiles en font d’écran. Une putain d’interaction avec les gens présents, prêts à en découdre et à slammer dans un Consortium rarement vu dans un tel état d’euphorie. Seul point négatif : la musique électro un poil dégueulasse, mais on lui pardonne. Car c’était beau à voir.
DIMANCHE.
Rebelote avec Rich Aucoin pour les kids. Un concert où vous n’aviez accès que si vous rameniez un mioche avec vous. Arrivés à la bourre, on entend déjà au loin les cris et les rires des marmots devant le show délirant du Canadien. Il a fait le choix de diffuser moins de vidéo Youtube. Les enfants, bien que plus éveillés que nous à leur âge, ne maîtrisent pas encore l’anglais. On retrouve les confettis, la danse sous le parachute arc-en-ciel et même un appareil à bulles. C’est dingue, un dimanche après-midi, les gamins sont aussi bouillants que nous la veille au soir après plusieurs bières. Le concert durera un peu moins longtemps : Rich qui a l’habitude de faire des concerts pour les plus petits sait à quel point il est difficile de capter leur attention plus de 40 minutes. Et puis, la fondue au chocolat les attend, il est 16h30 – heure sacrée du goûter – qui correspond également au seul moment de la journée où ils peuvent s’en mettre plein les doigts sans se faire engueuler par leurs parents.
Une heure plus tard, changement d’ambiance pour le Cabaret New Burlesque au Grand Théâtre. Première surprise, les gens -moyenne d’âge 45/50 ans- font la queue deux par deux et celle-ci s’étire jusqu’à place de la Libération. Du jamais vu.
Angoisse : placés au deuxième balcon, troisième rang, on ne voit tout simplement rien. On décide alors de redescendre tout en bas et de s’incruster dans la loge du rez-de-chaussée, à 2 mètres de la scène. Personne ne bloquait l’accès. Peinard. Le spectacle débute avec la présentatrice et unique véritable troubadour de la troupe, Kitten on the Keys, sorte de Régine délurée à la voix gracieuse. C’est elle qui annonce les numéros des autres filles (on parle ici d’effeuillage, hein) et qui en profite pour multiplier les blagues graveleuses. En une heure et demie elle aura réussi à épuiser tout le champs lexical, en français s’il vous plaît, se rapportant de près ou de loin aux organes génitaux (de la baguette en passant par le zizi, du minou en passant par les boobies).
C’est aussi le but de ce cabaret : réinventer et modifier les codes propres au strip tease : alors oui elles finissent toujours presque nues, mais chacune après des numéros et des méthodes bien différentes, parfois classes, souvent limite. On se marre beaucoup et on admire secrètement ces femmes qui, pleines de rondeurs, et pour la plupart d’un certain âge, se dévêtissent ainsi devant une salle comble, sans aucun tabou. Le public se prend au jeu, les gens braillent dès qu’une couche de lingerie tombe. Même topo quand le seul mec de la troupe, Rocky Roulette, vient à son tour nous présenter son torse et ses fesses rebondies. Plus efficace qu’une thérapie à 60€ la séance, plus reposant qu’un passage chez l’ostéopathe, on les aurait presque suivis jusqu’à Belfort.
Un dernier mot sur le journal du festival à Dijon, chapeauté par la Vapeur et les étudiants du master Euromédias. Bravo à eux qui ont été au taquet du début à la fin, et qui ont pu sortir chaque jour une édition papier avec des interviews, anecdotes et compte-rendus sur GéNéRiQ. Si vous avez envie de voir ce que ça donne, ou visionner les vidéos qui ont été tournées, ça se passe ici.
– par Sophie Brignoli, Badneighbour, Emmanuel Pop et Pierre-Olivier Bobo
Photos : Louise Vayssié (like sa page Facebook, vite)
Prochaine étape pour Sparse au festival GéNéRiQ : Besançon et Mulhouse. En terres inconnues, again. Restez branchez.